Il est bien trop tôt pour savoir si le pari engagé par Citroën avec l’Ami est réussi commercialement. Techniquement, cette voiture sans permis électrique se révèle convaincante, bien plus que le Renault Twizy qui a initié le genre chez les grands constructeurs.
Il peut sembler étonnant de voir Citroën s’aventurer sur un terrain où Renault, son éternel concurrent, a connu l’échec. Surtout que la catégorie en question, celle des voitures sans permis électriques, n’a tenté aucun autre grand constructeur jusqu’ici, malgré de nombreux concept-cars qui ont écumé les salons automobiles. Si le constructeur aux Chevrons a été parmi les derniers à dégainer une étude de style de micro-urbaine, l’Ami One au salon de Genève 2019 pour marquer son centenaire, il est aussi le seul a avoir concrétisé l’affaire par un modèle de série. Un an après son inspiratrice, voilà donc l’Ami devenue une réalité. Dans les concessions Citroën évidemment, mais aussi et surtout dans les magasins Fnac et Darty, ainsi qu’en autopartage, dans la flotte Free2Move du Groupe PSA. Car selon Citroën, il ne s’agit pas d’une voiture mais d’un « objet de mobilité », proposé à l’achat comme à la location, de courte ou longue durée.
Si la proximité avec le Twizy est manifeste, la différence saute aux yeux. Car cette Citroën Ami a pour principale caractéristique d’être entièrement fermée, avec deux places côte à côte. On est tenté de dire que le volume général se rapproche bien plus de celui d’une voiture traditionnelle. Mais, tout de même, le style apparaît déroutant. Car, pour limiter les coûts au maximum, l’Ami adopte des éléments de carrosserie symétriques. Les faces avant et arrière sont identiques, les ailes interchangeables, ainsi que les portes, qui ne s’ouvrent donc pas dans le même sens côté conducteur (ouverture inversée) et côté passager (ouverture traditionnelle). Voilà qui pousse encore plus loin une astuce exploitée par Chatenet avec sa CH26, pour rester dans le monde des voitures sans permis.
Rustique car économique
Si la Citroën Ami est identifiable comme une voiture sans permis, elle va à contrepied de la tendance de ce marché. Car là où tous les constructeurs, sous la pression de la clientèle, proposent des modèles ressemblant le plus possible à de vraies voitures, en utilisant au maximum les possibilités offertes par la réglementation en termes de dimensions (3 mètres de long, 1,5 m de large), Citroën a choisi un look singulier et une taille menue. Bien plus petite qu’une Smart Fortwo, l’Ami s’étend sur seulement 2,41 m alors que la largeur ne dépasse pas 1,39 m. Et alors que la plupart des Aixam, Ligier et autre Chatenet rivalisent pour offrir de grands coffres (un argument de poids pour la clientèle de ce genre de véhicules), Citroën a fait le choix radical… De ne pas offrir de soute ! Seule une niche, au pieds des passagers avant, permet de loger une valise cabine.
L’intérieur est rustique. Il fallait à tout prix limiter les coûts, pour tenir un prix de vente, inédit, de 6.900 € (et donc 6.000 € une fois le bonus déduit). Si la Citroën Ami a la bonté d’offrir des portes et un désembuage de pare-brise, l’équipement est tout aussi spartiate qu’à bord d’un Twizy. Les vitres s’entrebaîllent comme sur la vénérable 2CV et si on veut de la musique, il faut acheter en accessoire une petite enceinte Bluetooth, qui se place dans un porte-gobelet… lui-même vendu comme accessoire ! Car il n’existe qu’une unique variante à la sortie de l’usine marocaine de Kenitra. C’est cette version, très austère avec sa totale absence d’ornement et ses jantes en tôle, qui fait office d’entrée de gamme. Ce sont divers ensembles d’extras (livrés dans des boîtes en carton en même temps que la voiture), qui permettent de rendre l’Ami plus pimpante.
La Citroën Ami tient la route
Techniquement également, PSA a fait à l’économie. Certes, la structure tubulaire (apparente à l’intérieur) est inédite. Mais les trains roulants, économies d’échelle oblige, sont dérivés de ceux de la plateforme CMP des Peugeot 208 et Opel Corsa. Et le moteur, issu du catalogue Valeo, est initialement destiné aux hybridations légères ; il fonctionne sous une tension de 48 Volts, pour une puissance maximale de 8 ch, limitée par la réglementation. Enfin, la batterie au lithium se contente de 5,5 kWh, de quoi selon Citroën assurer une autonomie de 70 km environ, aux standards de la catégorie.
Au volant, les bonnes surprises s’enchaînent. La vigueur apparaît suffisante pour naviguer en ville sans effort, et même avec un certain agrément. La réponse à l’accélérateur est linéaire, immédiate, à défaut de coller les occupants aux sièges (peu confortables) : il faut 5 secondes environ pour atteindre 30 km/h, 10 secondes environ pour 45 km/h. Voilà qui place l’Ami à mi-chemin entre les modèles animés par le bicylindres diesel Lombardini DCI et ceux dotés du Progress d’entrée de gamme. Et le freinage régénératif, important, permet de s’arrêter sans toucher la pédale de frein, simplement en relâchant l’accélérateur. Surtout, le comportement routier s’avère très rassurant, plus que sur n’importe quelle voiture sans permis. Il faut dire que les trains roulants sont conçus pour des voitures trois à quatre fois plus lourdes que cette Citroën Ami qui avoue 485 kg, batterie comprise (la réglementation limite le poids à 425 kg, hors batterie).
Une conduite particulière
Les réactions sont donc plus celles d’une voiture traditionnelle que d’une voiturette, ce qui n’empêche pas la conduite de se révéler dépaysante. Car on est assis loin en arrière, à un bon mètre d’un pare-brise très vertical. Pour autant, la visibilité est bonne, du fait de la très large surface vitrée. On aurait craint que tout cela ne transforme l’habitacle en véritable serre, mais notre essai d’une vingtaine de minutes par un jour ensoleillé ne nous a pas infligé de suée. L’ouverture des vitres semble a priori suffisante. Côté confort, la suspension se révèle assez sèche, mais tout de même bien plus vivable que celle d’un Twizy. C’est très correct pour la catégorie.
Autre motif d’étonnement : le bruit du moteur électrique, assez sensible (mais tout à fait supportable) à bord, malgré un silence total à l’extérieur. Et il y les clignotants d’un autre âge, puisqu’ils ne s’éteignent pas automatiquement lorsque l’on revient en ligne. En somme, les quelques contraintes imposées par ce modèle apparaissent plutôt acceptables étant donné son tarif extrêmement faible, à partir de 6.000 € une fois le bonus écologique déduit. Reste à voir s’il est possible de vendre des milliers d’Ami sans permis, qui ne dépassent pas 45 km/h et n’ont accès ni aux voies rapides ni au périphérique. Rappelons en effet que Renault vend la majorité de ses Twizy en version quadricycle lourd, limitée à 80 km/h, preuve que la clientèle est bien différente de celle des voitures sans permis traditionnelles. Citroën ne s’interdit pas à l’avenir de proposer une telle variante, en cas de succès.
Cet engin léger et minimaliste, si intelligent qu’il soit pour la ville est-il réellement en phase avec les attentes d’une clientèle urbaine qui n’a souvent aucun moyen de charger une voiture électrique à domicile et qui effectue une bonne part de ses déplacements en transports en commun ? L’avenir le dira. En attendant, cette petite Citroën Ami se révèle diablement attachante.
La Citroën Ami face aux concurrentes
Renault Twizy
Le Twizy est évidemment la concurrente la plus évidente de l’Ami. Parce qu’il s’agit là du seul autre quadricycle produit par un grand constructeur. Dans les deux cas, équipement et finition sont spartiates, et le coffre inexistant. De quoi détourner la clientèle traditionnelle des voitures sans permis. Mais l’Ami offre une vraie protection aux éléments, un confort de suspension infiniment supérieur, et un tarif bien plus contenu. Avec l’achat de batterie, le Twizy démarre à 10.000 €.
Estrima Birò
A mi-chemin entre Twizy et Ami, l’Estrima Birò se présente comme l’urbaine idéale, grâce à son gabarit extrêmement réduit : 1,74 m de long pour 1,03 m de large. Surtout, elle présente un avantage unique sur le marché : une batterie amovible façon valise à roulettes qu’on peut emmener chez soi pour recharger. Mais le comportement routier est peu rassurant et le tarif bien plus élevé : 10.776 € en version de base et même 13.176 € si on veut des portes.
AS&PP City Fun
Directement importée de Chine, cette citadine électrique met en avant l’argument prix : 8.990 €, c’est certes plus cher que l’Ami, mais l’équipement apparaît autrement plus généreux (GPS, direction assistée, climatisation, caméra de recul…). Il y a un vrai coffre, et l’habitabilité s’avère généreuse. Mais le réseau de distribution est embryonnaire et le comportement routier s’avère fantasque, surtout au freinage.
Aixam e-City
Aixam est un des rares constructeurs traditionnels de voitures sans permis à proposer depuis des années des versions électriques de ces modèles. Récemment restylée, la e-City présente un look soigné, une finition plus avenante que l’Ami, un comportement routier sain et un bel agrément. Et le coffre apparaît géant par rapport à la concurrence. Mais elle est chère : 14.899 € au minimum en finition Pack, moins dépouillé que l’Ami mais pas vraiment généreuse non plus.
Les + :
Tarif imbattable
Look rigolo
Agrément de conduite
Compacité
Les – :
Intérieur rustique
Clignotants sans rappel
Pas de coffre
Suspension un peu sèche
Fiche technique Citroën Ami :
Dimensions (L x l x h) : 2,410 m x 1,390 m x 1,520 m
Empattement : nc
Voie av/ar : nc
Rayon de braquage : nc
Freins avant : nc
Freins arrière : nc
Volume du coffre : 0 litre
Hauteur de seuil : non applicable
Hauteur sous pavillon/sous tablette : non applicable
Largeur/profondeur de l’aire de chargement : non applicable
Largeur/hauteur de l’ouverture du hayon : non applicable
Moteur : électrique
Couple : nc
Type de batterie : Lithium-ion
Capacité de la batterie : 5,5 kWh
Autonomie : 70 km
Accélération de 0 à 30 km/h : 5 secondes environ
Accélération de 0 à 45 km/h : 10 secondes environ